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Une pionnière africaine de l’Internet, accusée de proxénétisme,
clame son innocence
OUMOU SY, l'égérie sénégalaise de l'Internet, lauréate 2001 du prix RFI
Net, vient de passer plus d'un mois en prison à Dakar . Elle a été mise en
liberté provisoire le 2 octobre, mais l'affaire suit son cours.
Oumou Sy, fondatrice en 1996 du Metissacana, le premier cybercafé d'Afrique de
l'Ouest, a créé successivement un site-portail sur le Sénégal, une société
de prestation de services, puis une boutique en ligne pour vendre ses créations
de mode - car elle est également styliste et directrice d'une agence de
mannequins.
C'est dans le cadre de cette dernière activité qu'elle est aujourd'hui accusée
de complicité de proxénétisme. Sous couvert de 1'organisation d'un défilé
de mode, elle aurait participé à la «livraison » d'une centaine de
jeunes femmes à de hauts responsables libyens à l'occasion des festivités du
32è anniversaire de la révolution, organisées le 1er septembre à
Tripoli. Cette affaire confuse et rocambolesque a failli entraîner la rupture
des relations diplomatiques entre le Sénégal et la Libye. Il a fallu une médiation
des Présidents zambiens et togolais pour que les soupçons pesant contre le
colonel Khadafi soient officiellement écartés : Diplomatiquement on a préféré
retenir l’hypothèse d’un « complot visant à détériorer
l’excellence des relations entre les deux pays »…
Sur le plan judiciaire, en revanche, rien n'est réglé. Oumou Sy a-t-elle trempé
dans cette affaire ? Ses avocats affirment que le dossier d'instruction est vide
et réclament un non-lieu, car les trois témoins à charges se sont rétractés
lors d'une confrontation dès le 12 septembre.
Par ailleurs, une enquête de moralité a établi qu'aucune des jeunes femmes en
partance pour la Libye n'était fichée comme prostituée.
Face à ce qu'ils considèrent comme un déni de justice, les amis d'Oumou Sy se
sont mobilisés pour faire pression sur les autorités. Michel Mavros, son mari,
dépose régulièrement des paquets de lettres de protestation à la Présidence
sénégalaise. Plusieurs manifestations de rue ont eu lieu, un disque est en préparation.
A Paris, un comité de soutien international a été créé, au premier rang
duquel figurent France Gall, Youssou N'dour, Baba Maal, le sculpteur Ousmane Sow,
la réalisatrice Laurence Attali ou le cinéaste Cheikh Omar Cissoko. Depuis
quelques jours, le comité parisien s'est emparé du site consacré à Oumou Sy
sur le portail Metissacana, pour y publier des messages de soutien, des
communiqués de presse et une chronologie détaillée de l'affaire.
Géraldine Faes
Copyright Le Monde du 5 octobre 2001